Sur les traces de la balnéothérapie sur la Corniche

Fin 2008, l’architecte Jean-Baptiste Pietri livre une maison à Marseille, dans le quartier de Malmousque. Le dessin très élégant du projet rappelle l’ancien centre de thalassothérapie qui se tenait là depuis le XIXème siècle. Sa construction s’inscrivait dans la mode de la balnéothérapie. Marseille accueillait alors plusieurs centres, aujourd’hui presque tous disparus.

L’architecture de la maison contemporaine évoque le passé du lieu. Ici se tenaient un centre de thalassothérapie, les Bains de mer chauds, pour profiter de la mode de l’époque. La médecine vient de découvrir les bienfaits de la balnéothérapie, et dès 1820, un premier centre est réalisé au Nord de la Joliette, dans les bassins d’Arenc : les Grands Bains de la Méditerranée.

Les bains du Roucas Blanc

La Corniche en 1895

Devant le succès de l’établissement, et suite à la découverte en 1850 d’une source d’eau chaude au Roucas-Blanc, d’autres centres vont ouvrir au Sud de Marseille. L’aménagement progressif de la Corniche, de 1848 à 1863, favorise encore leur essor, en particulier la construction des viaducs de l’Anse de la Fausse Monnaie et du Vallon des Auffes. C’est ainsi qu’un premier grand établissement, Les Bains du Roucas Blanc, est inauguré en 1875. Celui-ci propose deux bassins permettant les bains de mer, des salles d’hydrothérapie puis, plus tard, un restaurant. Toutes ces activités sont orchestrées par un médecin. L’établissement est devenu depuis l’hôtel Palm Beach.

L’engouement des Marseillais va croissant. Rapidement, la Corniche voit s’installer une multitude d’établissements. Il faut citer les Grands Bains des Catalans, ensemble remarquable signé par l’architecte Bordes et inauguré en 1860. De nombreuses installation nautiques sont construites autour de l’établissement, comme des cabines, des douches ou des plongeoirs. L’attraction continue le siècle suivant avec, en 1928, le premier bassin d’eau de mer créé aux Catalans, qui deviendra par la suite le Cercle des Nageurs de Marseille.

La Réserve – Roubion

L'ancien hôtel La Réserve
L’ancien hôtel La Réserve

On verra même des établissements prestigieux s’installer sur la Corniche fraîchement aménagée. Parmi eux, un hôtel de renom: la « Réserve », qui s’installe en 1860. C’est le restaurateur Roubion qui, décidant de quitter son restaurant près du Pharo, décide d’ouvrir ici un hôtel de luxe. Certains diront même que c’est l’établissement le plus luxueux que Marseille ait jamais connu. Il doit son nom à une ancienne réserve de crustacés, en contrebas, que le bâtiment surplombait.

Le bâtiment est superbe : dissimulé derrière les pins parasols, il est encerclé de colonnades corinthiennes élancées sur deux étages, portant fièrement des arcs en plein cintre. À l’intérieur, les voyageurs et les thermalistes sont accueillis dans d’immenses salles de réception richement décorées. Sa position idéale, posé sur un soutènement massif, fait de lui un véritable repère architectural sur la Corniche.

L’établissement ferme définitivement ses portes en 1969. La réserve de crustacés, elle, avait été vendue en 1936 pour y créer le Club des Dauphins, un club nautique. L’établissement nautique existe toujours sous le nom de Sporting Club de la Corniche. L’hôtel lui, est entièrement détruit en 1970 sans que personne ne s’y oppose. Depuis le terrain est occupé par une résidence de luxe, conçue par l’architecte Benard Laville, à l’origine entre autres du Grand Pavois au Rond-Point du Prado. La résidence a gardé le nom de la Réserve.

L’ancienne Villa Castellamar

Pour finir, il faut tout de même parler du Château Berger. Il s’agit du seul établissement de thalassothérapie encore en activité sur la Corniche. Le bâtiment, construit en 1860, s’inspire directement du Château de Chambord. Initialement appelée Villa Castellamar, elle change de nom lorsque ses repreneurs l’achètent en 1923. Il s’agit de la famille marseillaise Gassier, propriétaires des Pastis Berger.

En plus de ses activités de thalassothérapie, le château Berger accueille une clinique esthétique. Encore aujourd’hui, l’établissement met à disposition des thermalistes une piscine intérieure d’eau de mer chauffée, un bain bouillonnant à l’eau de mer, mais aussi diverses sortes de douches, un hammam et plusieurs cabines de soins.

D’autres villas luxueuses s’installent sur la Corniche. On peut citer entre autres la Villa Valmer, construite en 1865 par l’architecte Henry Condamin, dont le nom est une contraction de Vague à la mer.

Les bains de mer chauds

Les bains de mer chauds ouvrent leurs portent au début du XXème siècle. Situés à l’entrée du village de Malmousque en venant du Vieux-Port, juste après le Vallon des Auffes, l’établissement propose une piscine couverte, plusieurs salles de soin, ainsi qu’un restaurant avec une large terrasse sur pilotis en belvédère au-dessus de la mer. Le site est exceptionnel : à l’écart de la circulation de la Corniche, il s’ouvre sur la baie de Marseille face aux îles du Frioul et du Château d’If. Le terrain a les pieds dans l’eau. Le succès est immédiat.

L’ensemble va subir plusieurs transformations. Au cours des années 1980, une vaste campagne de travaux est entreprise. Le lieu perd de son charme, les volumes sont rationalisés, l’ensemble forme une forteresse. L’accès à la thalassothérapie ne se fait plus que par un escalier aveugle, privant de vue vers la mer. L’activité cesse définitivement au début des années 2000, faute d’entretien et à cause de la vétusté des équipements.

Les nouveaux propriétaires de la parcelle commandent à Jean-Baptiste Pietri deux maisons sur le terrain. La parcelle est difficile d’accès, parce qu’elle présente un dénivelé de 17 mètres.

L’architecte propose de conserver et restaurer la façade historique de l’établissement, sur la Corniche. En revanche, l’intégralité des anciennes constructions, fortement dégradées, ont été démolies. Les maisons sont construites en structure acier galvanisé de couleur blanche. La première offre cinq chambres sur 450 m² et la deuxième, trois chambres sur 180 m². Elles se relient entre elles par un jeu d’escaliers, et s’ouvrent sur une large terrasse offerte à la mer.

L’écriture est minimaliste. Des toiles tendues et des jeux de persiennes évoquent le passé du terrain. La terrasse en bois dispose d’un couloir de nage dans l’axe de la vue. Les volets en accordéon permettent de refermer la villa sur elle-même, ou au contraire de l’ouvrir entièrement à tous les vents. Les menuiseries peuvent se rabattre les unes sur les autres pour donner à aux constructions une parfaite transparence. Autour, des jardinières sont disséminées pour offrir un peu de verdure à l’ensemble.

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